1860-1935
Un médecin en mission dans les Aurès à la fin du xixe siècle
Dorothée Chellier, une des premières femmes médecins en France, a accompli plusieurs missions dans les Aurès, en Kabylie et au Maroc, afin d’y améliorer les pratiques sanitaires, particulièrement les accouchements. Elle est aussi une des premières initiées au DROIT HUMAIN, sa mission de médecin se fondant, comme elle l’écrit, sur son engagement humaniste.
Dorothée Chellier est née à Alger le 18 février 1860, fille de Joseph Chellier et de Françoise Valentin. Elle poursuit des études de médecine à Paris et soutient sa thèse en 1894 : Fièvre typhoïde et Fièvre puerpérale.
Elle désire ensuite aller exercer son art en Algérie mais, avant son départ, demande à être initiée au Droit humain et, en 1895, « la Vénérable maîtresse [confère], en vertu de l’article 14 modifié de la constitution, les trois degrés à Mme Chellier, médecin, en partance pour l’Algérie, à charge pour elle de faire œuvre utile dans les domaines social et maçonnique ».
Dans son testament philosophique, elle écrit : « Je désire entrer dans la Franc-maçonnerie pour unir mes efforts à ceux de mes Sœurs et de mes Frères afin de faire triompher l’égalité dans les deux sexes et dans toutes les conditions ». Elle est la 48e initiée dans le tout nouvel ordre.
Selon Claire Fredj, qui a édité les œuvres de Dorothée Chellier, C’est probablement Georges Martin (médecin lui-même) qui a écrit à Marie Becquet de Vienne pour qu’elle recommande Dorothée Chellier au diplomate Jules Cambon, gouverneur général de l’Algérie. Dorothée Chellier fut ainsi chargée par le gouverneur de plusieurs missions, dans les Aurès, en Kabylie, au Maroc.
De cette expérience, elle va tirer un ouvrage : Voyage dans l’Aurès: notes d’un médecin envoyé en mission chez les femmes arabe, Tizi-Ouzou : impr. J. Chellier, 1895, ouvrage réédité aujourd’hui par les éditions Hachette BNF et consultable sur Gallica. Deux autres ouvrages, plus rares, sont disponibles à l’Académie de médecine.
Elle y fait de nombreuses remarques ethnographiques et un tableau précis des maladies qu’elle rencontre, particulièrement chez les femmes et les enfants. Elle propose de former les matrones indigènes par des sages-femmes françaises. Elle s’interroge aussi sur la colonisation : ” Nous ferions mieux encore en Algérie si nous arrivions à pénétrer la vie intime indigène, sans chercher à lui imposer notre croyance. C’est le seul vrai moyen de gagner l’arabe à notre cause.” (pp.25-26)
Dorothée Chellier se fixa ensuite à Nice, où elle ouvrit un cabinet et fut affiliée dans la loge du DROIT HUMAIN n° 37, « le 9 germinal an 119 de la République » (1911) lors de la consécration de la Loge, qui allait prendre le titre distinctif Eugène Piron. Cette cérémonie est racontée dans le bulletin n°4 d’avril 1911. La présidente, la Soeur Blanche Mesnages, l’accueillit en ces termes : notre Sœur « s’est toujours montrée à la hauteur de sa tâche ; non seulement elle sut travailler au bien être physique des malheureux dont elle avait à s’occuper, mais par sa bonté et sa douceur elle sut leur insuffler l’amour de la France ».
Dorothée Chellier est morte à Nice le 5 mars 1935.